RDC-Collectif budgétaire : Adolphe Muzito n’est pas d’avis avec le Gouvernement

Depuis Bruxelles, Adolphe Muzito ne partage pas le point de vue du Gouvernement qui envisage un collectif budgétaire pour adapter le budget de l’exercice 2020 aux réalités du terrain face à la crise économique engendrée par le COVID-19.

A la place, cet ancien Premier ministre de la RDC propose plutôt la mise en place d’un programme ambitieux de développement.

« Ce n’est pas un collectif budgétaire dont le pays a besoin, mais d’un programme triennal, voire quinquennal, pour faire face aux effets économiques et sociaux de COVID-19 et aux défis traditionnels de la RDC. Le pays est doublement malade. Il l’était déjà avant COVID-19. Il faudrait réajuster le programme du gouvernement à cet effet », pense Muzito interviewé par la presse depuis Bruxelles.


Économiste reconnu, il explique que « les effets du COVID-19 s’inscriront non pas dans le court, mais dans le moyen et long terme (2 à 3 ans) ». Pour lui, « le réajustement du budget 2020 aura la faiblesse de se limiter aux six prochains mois et à revoir à la baisse le niveau des recettes propres de l’Etat. Il ne pourra nullement prendre en charge les conséquences économiques et sociales de la pandémie, lesquelles exigent plus des sources que le pays ne saurait mobiliser à l’interne et plus de temps pour amortir le choc ».

L’ancien Premier ministre croit dure comme fer qu’ « il faut un programme à court, moyen et long terme, chiffré, en prenant en compte l’ensemble des besoins du pays et proposant leur mode de financement ».

« Tout ceci assis sur des réformes institutionnelles, économiques et sociales, gage de bonne gouvernance et du redressement économique et social », ajoute-t-il

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Expert en la matière, Adolphe Muzito affirme que « ce programme ne devrait pas porter sur les seules finances publiques, mais aussi sur les économies publique et privée, donc pour la mobilisation à leur profit des ressources extérieures ». Dans ce cadre, poursuit-il, la BCC devrait être recapitalisée pour servir de support autonome au système financier du pays. Ce qui suppose des réformes dans tous ces secteurs ».

Le programme que préconise Adolphe Muzito devrait alors avoir en annexe le collectif budgétaire qui va couvrir, notamment le second semestre de l’année 2020 et sera la première composante du programme triennal ou quinquennal à partir de juin 2020 tel que le prévoit le programme informel en cours avec le FMI et la Banque Mondiale.

Dans ses explications, il indique que « cela signifie que le programme de référence a échoué ».
« Le gouvernement et la Banque Centrale semblent faire l’impasse sur les causes de l’échec. Quant au respect du plan de trésorerie, les mêmes causes produisant les mêmes effets, le gouvernement ne saura ni éviter le dépassement, ni réussir l’équilibre entre les dépenses et les recettes, moins encore réaliser des marges de trésorerie. Bien au contraire, les choses vont s’empirer. Il suffit des bruits des bottes dans l’Est pour que l’équilibre du plan de trésorerie soit rompu », a-t-il dit.

A l’idée du gouverneur de la BCC d’injecter la liquidité en devises convertibles pour stabiliser le franc congolais, Muzito pense que « ce n’est pas avec 300 ou 400 millions de dollars américains que ce pouvoir va stabiliser le franc congolais d’ici la fin de l’année. Avec plus d’un milliard de dollars américains de réserves de change, entre 2012 et 2018, ils n’ont pas réussi à soutenir la monnaie nationale qui a perdu plus de 50% de sa valeur extérieure ».

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« En effet, ils ont hérité de mon gouvernement, début 2012, de 1,700 milliards de dollars américains des réserves de change. En 2018, le pays n’avait plus que 700 millions dollars américains », a-t-il rappelé.

Sera-t-il possible que la RDC entre en programme formel avec le FMI, début 2021 si le plan de trésorerie est respecté ? A cette question, Adolphe Muzito estime que « le pays ne doit pas attendre 2021 pour entrer en programme avec le FMI et la Banque Mondiale, sinon entre mai et décembre 2020 la monnaie va se casser la figure, avec toutes les conséquences sur le pouvoir d’achat des populations et des agents de l’Etat ».

Cet économiste de carrière est d’avis que « le gouvernement doit préparer dès à présent son programme, le défendre parallèlement auprès du Parlement et des institutions de Bretton Woods.  Commencer les négociations dès le mois de juin et espérer conclure un programme formel en septembre 2020 ».

« Le franc congolais n’étant pas une monnaie convertible et la BCC étant en faillite, la stratégie de soutien à l’économie par expansion monétaire est à exclure pour la RDC. Seul le recours aux avoirs extérieurs par l’endettement, tel que dit ci-haut, en profitant du contexte international, peut permettre à la RDC de sortir de sa situation »,  conseille Muzito.

Rachidi Mabandu Mikondo

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